Je me retrouve sans toit, à la rue, comme un con. Ca ne fait que quelques semaines qu'on est installé à Christchurch et voilà que je devais me trouver un autre endroit pour vivre. Je ne peux pas rester dans le même appartement qu'elle. Impossible. Cet appart' est associé à tout jamais avec cette horrible image que j'ai eu sous mon nez. Ma copine. Mariana. Avec un type. A poil. Dans notre lit. Putain de merde, je m'en remets toujours pas. J'étais tellement sûr qu'elle était la femme de ma vie. Ca faisait quand même plus d'un an qu'on était ensemble tous les deux, c'était du sérieux. Pour moi du moins, ça n'était sérieux que pour moi visiblement. Je ne sais pas depuis quand elle me trompait, si c'était la première fois ou non. J'en ai rien à foutre, c'est trop tard. Je suis fou d'elle, mais jamais elle ne pourra se faire pardonner de ce qu'elle m'a fait. J'ai fait mes valises en deux minutes. Je n'avais pas encore eu le temps de m'acheter quoi que ce soit d'extravagant, tout est retourné dans ma valise aussi vite que quand j'ai tout défait. Elle a essayé de s'expliquer alors que je prenais le chemin de la sortie mais je n'ai pas écouté. Il n'y a aucune raison valable pour ce qu'elle venait de me faire. Je préfère en savoir le moins possible. De toute façon il faut que j'aille de l'avant à partir de là. Je n'accepte pas qu'on me trahisse comme ça. Je ne donne pas de deuxième chance quand il s'agit de quelque chose d'aussi grave. Elle ne le mérite pas, et puis je n'ai plus du tout confiance en elle. Une fois dehors, sur le trottoir, je pose ma valise et je me passe les mains sur le visage. J'ai envie de gueuler bordel. J'ai mal. Physiquement mal. C'est fou ce qu'on peut ressentir à cause ou grâce à quelqu'un. J'ai été tellement heureux avec elle, maintenant je suis brisé.

Je ne veux pas me mettre à chialer devant des inconnus dans la rue, ou pire, des gens que je connais. Alors je prends ma valise et je me dirige jusqu'à chez mon ami Tomas. C'est mon meilleur pote et j'espère qu'il va accepter de me dépanner quelques temps. Je sonne à son interphone et j'entends la porte qui s'ouvre, aucune idée si c'est lui qui a ouvert, mais je rentre. Je monte à son étage et je frappe à sa porte. J'espère qu'il est là, on est en plein milieu d'après midi, il est barman, ça devrait être bon. Il bosse la nuit. Quand il ouvre la porte je lui fais un maigre sourire, ça se voit sur ma tronche que quelque chose ne va pas du tout.

« Hey... J'espère je te dérange pas, ou je te réveil pas ou quoi... »

Je me mords la lèvre, j'ai vraiment besoin d'avoir un endroit à moi, m'enfermer dans une salle de bain, me prendre une douche et chialer toutes les larmes de mon corps.

« Ca me dépannerai si je pouvais squatter ton canapé quelques jours le temps que je me trouve un autre appart'... »

Je crois que je n'ai pas besoin de lui expliquer, c'est très clair. Tomas sait très bien que j'habitais avec Mariana depuis mon retour, mon très récent retour. Tout est passé tellement vite, j'en reviens toujours pas de ce retournement de situation. J'espère que demain matin je me réveillerai et que tout ceci n'était qu'un cauchemar.

J’émerge enfin du sommeil en milieu d’après-midi parce que je suis rentré très tôt dans la matinée et j’avais vraiment besoin de toutes ces heures de repos ; pour une fois, je n’ai pas eu tous ces cauchemars et je me dis que j’ai bien raison de faire autant d’heures de travail parce qu’en rentrant, je suis tellement mort que je m’écroule d’un coup. Je me lève du lit et traîne dans l’appartement en calbute, comme je vis tout seul, ça ne dérange personne alors j’en profite. Je vais jusqu’à la cuisine me faire un petit café que je bois tranquillement au comptoir de cette dernière. Un coude sur le comptoir, ma joue calée contre la paume de ma main, je suis encore un peu à l’ouest mais je pense que ça ira mieux après une petite douche. Je termine rapidement la tasse de café et fonce jusqu’à la salle de bain, histoire de pas perdre trop de temps. Je sais pas encore ce que je vais faire, mais je n’ai pas envie de rien foutre et être une larve jusqu’à ce que je prenne mon service dans la soirée.

Une fois sorti de la douche, je me sèche et enfile des fringues avant de perdre toute motivation et faire le légume sur le canapé, télécommande dans une main. Je crève la dalle, mais j’ai la flemme de faire un truc alors je chope mon portable et commande une pizza qui devrait être livrée dans la demi-heure. En attendant, je me cale de nouveau confortablement et baille comme un perdu. Sauf que rapidement, on sonne à l’interphone donc je fronce les sourcils ; soit le livreur a mit le turbo, soit j’ai une visite inattendue. Je me lève, ouvre la porte et reste devant celle de l’entrée puisque je présume qu’on va frapper d’ici quelques secondes et ça ne manque pas.

J’ouvre la porte et me retrouve face à Enzo, mon pote, mon frère. Rien qu’à sa tronche, je sens que quelque chose ne va pas du tout et autant dire que je n’aime pas ça.

« Nan t’inquiètes, entre… »

Je me décale de l’entrée, le laisse venir dans l’appartement et referme la porte. Lorsqu’on se retrouve au salon, il me demande si j’accepterai de le dépanner le temps qu’il se trouve un autre appartement. OK. Il ne faut pas être bien intelligent pour comprendre que c’est fini avec sa copine et qu’il se retrouve vraiment dans la merde.

« Un canapé ? Mais t’sais que j’ai une seconde chambre qui me sert pas vraiment ? Si tu la veux, tu la prends. »

Je trouve que ce serait quand même plus sympathique qu’un fichu canapé dans le salon et au moins, il n’aura pas à faire des recherches pendant des semaines pour un appartement. Moi, ça me dérangerait clairement pas qu’il vive là. De toute façon, je ne suis là que quelques heures dans la journée ; le matin je pionce jusqu’à environ quatorze ou quinze heures, après je sors un peu et en soirée, je suis au travail… On se marcherait pas sur les pieds.

« Et je suppose que t’as pas envie d’en parler ? »

Au cas où, on ne sait jamais. Je l’invite à prendre place sur le canapé et vais nous chercher de quoi boire dans la cuisine.